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Yazarın fotoğrafıMoussa Hissein Moussa

La Diaspora Africaine et la Question de Retour :Motivations, Défis, Piège, Enjeux

Introduction

La diaspora africaine, constituée de personnes originaires du continent et vivant à l'étranger, occupe une place de plus en plus prépondérante dans les dynamiques mondiales, tant sur le plan social qu'économique. Cette dispersion, largement héritée des séquelles de la traite transatlantique et de la colonisation, s'est amplifiée avec les défis contemporains tels que la mauvaise gouvernance et les conflits internes en Afrique. La présence de cette diaspora demeure ainsi un pilier essentiel pour le développement du continent. Les panafricanistes soulignent depuis longtemps l'importance de réconcilier la diaspora avec l'Afrique, soulignant que leur séparation risquerait de compromettre l'identité africaine ainsi que la compréhension de la portée historique et actuelle de la contribution de l'Afrique au monde. Dans ce contexte, se pose la question centrale de la volonté et des motivations de la diaspora africaine à retourner dans son pays d'origine, ainsi que des défis, pièges et enjeux auxquels elle est confrontée dans ce processus de retour.



Les Motivations Autour du Retour

Au sein de la diaspora africaine, qu'elle soit issue de la traite transatlantique ou qu'elle soit composée de personnes en quête d'un meilleur avenir, de nombreux individus envisagent un retour dans leur pays d'origine à un certain stade de leur vie, sous certaines conditions favorables. Cette décision complexe est souvent motivée par une variété de facteurs, qui peuvent être regroupés en deux grandes catégories : les motivations « naturelles » et les motivations « exceptionnelles ».


Les motivations « naturelles » reflètent les aspirations personnelles et professionnelles des membres de la diaspora, qui cherchent un environnement propice à leur épanouissement. Tout d'abord, la possibilité d'être apprécié à leur juste valeur est cruciale. De nombreux membres de la diaspora africaine ressentent un manque de reconnaissance pour leurs compétences et contributions dans leur pays d'accueil. Ainsi, s'ils constatent une amélioration de l'environnement professionnel et des opportunités de développement dans leur pays d'origine, ils pourraient être davantage enclins à y retourner, où leurs talents pourraient être pleinement reconnus et valorisés.



De même, la perspective de pouvoir rivaliser à armes égales est un autre moteur de retour. À l'étranger, les membres de la diaspora peuvent rencontrer des obstacles institutionnels ou socio-économiques qui limitent leurs opportunités de succès. Cependant, s'ils constatent des progrès dans la réduction de ces barrières et un engagement envers l'égalité des chances dans leur pays d'origine, cela pourrait les encourager à revenir et à concourir sur un pied d'égalité avec les autres citoyens.

Enfin, un environnement propice à l'entrepreneuriat est une autre motivation naturelle pour envisager un retour. De nombreux membres de la diaspora africaine sont animés par un esprit d'entreprise et aspirent à créer leur propre entreprise ou à contribuer au développement économique de leur pays d'origine. S'ils observent des initiatives visant à soutenir l'entrepreneuriat et à créer un climat favorable aux affaires dans leur pays d'origine, cela pourrait être un facteur déterminant dans leur décision de revenir.


Les motivations « exceptionnelles » renvoient quant à elles à des convictions profondes envers la patrie, incitant les membres de la diaspora à œuvrer pour le bien-être de leur pays d'origine, même dans des conditions difficiles. Tout d'abord, le sens du patriotisme joue un rôle crucial. Malgré les défis rencontrés dans leur pays d'origine, certains membres de la diaspora africaine ressentent un attachement profond envers leur patrie et un fort sentiment de devoir envers celle-ci. Contrairement aux motivations « naturelles », les motivations « exceptionnelles » adoptent une perspective différente. C’est-à-dire qu'ils ne cherchent pas à revenir seulement quand tout va bien, mais plutôt à contribuer à ce que tout aille bien. Ici, l’engagement envers la patrie prime, et la diaspora ne conditionne pas son retour à des circonstances spécifiques, sa seule condition étant l'amour pour la patrie.


La volonté d'œuvrer pour leur patrie malgré les difficultés constitue une autre motivation exceptionnelle. Même face à des obstacles importants tels que la corruption, l'instabilité politique ou économique, certains membres de la diaspora africaine sont déterminés à apporter leur expertise, leurs ressources et leur énergie pour aider à surmonter ces défis. Cela avec la volonté de fournir des efforts significatifs pour relever ces défis et créer un environnement propice au progrès.



Les conditions économiques influent-elles sur la décision de revenir au pays ?

Les perspectives économiques et la stabilité politique en Afrique sont des éléments cruciaux qui influencent la décision des membres de la diaspora de contribuer au développement de leur pays d'origine ou de chercher des opportunités ailleurs.

Dans un premier temps, les conditions économiques favorables, offrant des opportunités d'emploi et d'entrepreneuriat, peuvent encourager le retour des membres de la diaspora. En revanche, une instabilité économique et des taux de chômage élevés peuvent les dissuader de revenir. De même, une stabilité politique et sociale garantit un environnement sécurisé et prévisible, favorisant ainsi le retour des membres de la diaspora.


Pour les motivations « exceptionnelles », les défis économiques et politiques peuvent renforcer le sens du devoir envers la patrie chez certains membres de la diaspora, les incitant à contribuer au développement de leur pays malgré les difficultés rencontrées. Ici, ce manque de stabilité économique et politique devient une source de motivation et un défi à relever pour la diaspora animée par le patriotisme.


Un Apport à Coup d’opportunité Élevé

Il est essentiel de souligner que la diaspora constitue une source vitale pour les économies des pays africains. À titre d’exemple, selon les données de la Banque Mondiale de 2019, alors que le Sénégal a reçu une aide publique au développement de 1,4 milliard de dollars cette année-là et que les flux nets d’investissements directs étrangers étaient d’un peu moins d’1 milliard de dollars, les transferts de fonds de la diaspora (les migrants) s’élevaient à 2,4 milliards de dollars. Cette somme dépasse ainsi la combinaison totale de l’aide publique au développement et des investissements directs étrangers, représentant à cet effet une ressource financière cruciale pour l’économie sénégalaise.

Cependant, vu le niveau d’industrialisation médiocre et le mode de consommation orienté vers l’importation de bon nombre de pays africain a l’instar du Sénégal, les fonds envoyés par la diaspora qui a généralement pour objectif d’alimenter les ménages ne fait qu’enfoncer les pays africains dans le système de consommation.



En pratique, si on inclut les frais de conversion (de l’Euro en Franc CFA ou du Dollar en Euro puis en Franc CFA, étant donné que le Franc CFA est arrimé à l’Euro), les taxes liées aux transferts et les impôts liés à l’importation des produits, pour une consommation de l’équivalant de 5 Euro en Afrique, la diaspora se doit de mobiliser son double, à peu près 10 Euro. Il est essentiel de gagner en Afrique, mais aussi de consommer en Afrique ce qui se produit sur place. À cet effet Thomas Sankara dixit : « consommons ce que nous produisons et produisons ce que nous consommons ».


Les Enjeux à Saisir et le Piège à Éviter

Le piège dans lequel se trouvent nombre de ceux de la diaspora est les méthodes et secteurs d’investissements préétablis par le système impérialiste. Selon l’historien Amzat Boukari-Yabara, la diaspora africaine en Europe, lancée dans une quête d’enrichissement incluant toutes méthodes, court le risque de devenir la proie facile de la politique néo-impérialiste, surtout françafricaine. Cette politique qui vise à prendre ses distances avec le pré carré, non pas pour laisser les anciennes colonies à leur sort, mais pour les confier à une classe élitiste formée et soutenue afin de prendre le relais au nom de la métropole. En d’autres termes, il s’agit d’une transition du système de néo-colonisation dite « directe » à celui dit « indirect ».


Le sommet « Afrique-France » tenu en 2021 à Montpellier en dit long sur la situation. Le gouvernement français, prenant acte de la prise de conscience grandissante au sein de la jeunesse africaine et reconnaissant la dynamique inéluctable qu'elle incarne, se réoriente en mettant l'accent sur l'élan émergent plutôt que de maintenir des alliances avec d'anciens dirigeants dictatoriaux décriés. La mise en place du Conseil Présidentiel pour l’Afrique (CPA), composé uniquement de jeunes trentenaires, majoritairement binationaux, entrepreneurs ou engagés dans la société civile, montre la volonté de l’Élysée de se renouveler.


Cependant, il est important de se demander si d’une telle jeunesse diasporique ou du continent, à la merci de tout un chacun, que l’Afrique a réellement besoin. Il semble que ce soit plutôt une jeunesse consciente des enjeux globaux, régionaux et nationaux, capable de synthétiser sa situation diasporique et celle du continent.


Sur le continent africain, divers pays, communautés, jeunes, enfants, femmes, agriculteurs, citadins, et autres, s'organisent en fonction de leurs propres normes, interactions et perspectives sur la vie en société. Cette richesse de diversité ne peut être ignorée par personne, souligne Amzat dans un interview.


La diaspora, sans s'égarer dans des illusions, doit prendre en considération ces réalités. Son objectif ne devrait pas être d'être un fardeau ou un obstacle, mais plutôt de fournir une valeur ajoutée, de contribuer au progrès du continent en partageant son expertise, son savoir et les moyens nécessaires. Cependant, il est essentiel de faire la distinction entre l'expertise dans un domaine et l'imposition d'une idéologie expérimentée.



Dr. Cherif Salif Sy qualifiait de manière critique les croissances liées aux investissements étrangers comme étant « appauvrissantes ». Car ce type de croissance contribue à l'appauvrissement du continent, du fait que la majeure partie de la valeur ajoutée générée provenait des partenaires extérieurs. En d'autres termes, cette croissance ne générait pas d'emplois pour la main-d'œuvre abondante disponible dans le pays. Il était manifeste que les investissements étrangers n’étaient pas motivés par le simple bien-être des Africains. Si tel était cas, il y aurait moins d'importations massives de produits en provenance de l’étrangers et l'on favoriserait plutôt l'implantation d'usines sur place afin d'absorber la main-d'œuvre locale.


Conclusion

La question du retour de la diaspora africaine demeure une préoccupation majeure nécessitant l'attention de chacun, en fonction de sa position socio-économique et socio-professionnelle, afin de trouver des réponses appropriées. Dans un contexte africain où les institutions étatiques peinent à répondre aux besoins des populations, la problématique du retour devient complexe, engendrant d'autres préoccupations telles que la fuite des ressources humaines et la fuite des cerveaux. Il incombe aux gouvernements de prendre cette question au sérieux, et aux jeunes du continent ainsi qu'à la diaspora de faire preuve d'un plus grand sens du patriotisme et de s'impliquer davantage dans la politique pour réaliser chez eux les idéaux occidentaux tant enviés. Il est important de reconnaître que personne, plus encore, même Dieu, ne peut améliorer la vie d'une société tant que celle-ci ne s'engage pas dans un processus de changement. De même, aucun monde meilleur ne se crée de lui-même ; il faut de l'engagement, de l'organisation, des sacrifices, mais surtout du patriotisme. Comme le disait Thomas Sankara, « Seule la lutte libère ». Mais il faut le croire, comme Amilcar Cabral quand il disait : « la lutte doit continuer ». Car, tout l’Afrique a besoin de sa diaspora pour s’épanouir, la diaspora a pour autant besoin de l’Afrique pour se repérer et s’identifier. À cet égard, l'historien Elika M’Bokolo affirme : « On ne saurait, sans courir le risque de briser l'élan panafricain, séparer l'Afrique de ses diasporas : sans l'Afrique, les diasporas africaines n'ont pas d'identité ; sans les diasporas, l'Afrique perdrait de vue aussi bien l'ampleur de sa contribution passée et actuelle à notre monde que l'étendue mondiale de ses responsabilités ».

 



 

 


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